Icon/Horloge Created with Sketch. 15.04.2025

0 commentaire

159- L’acupuncture option thérapeutique dans les recommandations françaises sur la gonarthrose.

Pers YM, Nguyen C, Borie C, Daste C, Kirren Q et al. ; Société Française de Rhumatologie and Société Française de Médecine Physique et de Réadaptation. Recommendations from the French Societies of Rheumatology and Physical Medicine and Rehabilitation on the non-pharmacological management of knee osteoarthritis. Ann Phys Rehabil Med. 2024 Oct 26;67(7):101883. [1]

En 2024, les sociétés françaises de rhumatologie (SFR) et de médecine physique et de réadaptation (SOFMER) ont publié leurs recommandations sur la prise en charge non pharmacologique de la gonarthrose [1], en complément des recommandations pharmacologiques parues en 2020 [2]. L’acupuncture y figure comme option thérapeutique

Méthode

Revue de la littérature

Les principales sources de référence initiales étaient les recommandations de l’OARSI 2019 [3] et de l’ACR 2020 [4], dont les revues bibliographiques s’arrêtaient respectivement en juillet et août 2018. À partir de cette base le groupe de travail a inclus tous les essais contrôlés randomisés (ECR), revues systématiques et méta-analyses publiés jusqu’au 1er octobre 2021, date de clôture de la recherche bibliographique.

Organisation des travaux

Un comité de pilotage multidisciplinaire de 35 membres a coordonné l’analyse critique de la littérature et la formulation des recommandations. Ce comité incluait des professionnels de santé de différentes spécialités ainsi que des représentants de patients. Chaque proposition a été discutée collectivement lors de réunions dédiées pour validation.

Les recommandations finales ont été formulées, comme classiquement, à partir de trois dimensions complémentaires :

  • Le niveau de preuve : il reflète la qualité méthodologique des données disponibles. Il est hiérarchisé selon une échelle allant du niveau 1A (méta-analyses d’essais contrôlés randomisés) au niveau 4 (avis d’experts). Il permet d’évaluer la robustesse scientifique des résultats.
  • La force de recommandation : elle tient compte du niveau de preuve, mais aussi de la balance bénéfices/risques, de la faisabilité, du coût et de l’acceptabilité clinique. Elle est graduée de A (fortement recommandé, généralement sur des preuves de niveau 1) à D (recommandation possible malgré des preuves limitées ou extrapolées, de niveau 3 à 4).
  • L’accord moyen : il exprime le degré de consensus entre les membres du groupe de travail, sur une échelle de 0 à 10. Il est accompagné de l’écart type, permettant de mesurer l’homogénéité des opinions.

L'acupuncture figure comme option thérapeutique avec un niveau de preuve 1A dans la recommandation 8, reproduite ci-dessous avec son argumentaire.


8- L’acupuncture pourrait être proposée à visée antalgique non spécifique (niveau de preuve = 1A, force de recommandation B, accord moyen 7,97).

L'acupuncture est une pratique médicale chinoise traditionnelle qui consiste à insérer de fines aiguilles à des points spécifiques du corps, en se basant sur le concept de Qi, cette énergie vitale qui circule dans les méridiens ou voies du corps. Les aiguilles sont insérées à des profondeurs variables en fonction de la condition traitée et de l’évaluation du praticien. Deux études récentes de bonne qualité méthodologique ont démontré un bénéfice significatif à court terme de l’acupuncture (en utilisant deux modalités différentes : électro-acupuncture ou acupuncture manuelle) sur la douleur et la fonction chez les personnes atteintes d’arthrose du genou [5, 6]. Le comité souligne plusieurs points à garder à l’esprit : l’effet limité à long terme (< 3 mois), la prédominance des études chinoises qui limite l’extrapolation des résultats, l’hétérogénéité des techniques, l’effet placebo contextuel, un possible biais envers le respect strict des procédures de fausse acupuncture, et le coût potentiel des séances pour l’individu. L’acupuncture semble être un choix pragmatique pour les personnes souffrant de douleurs chroniques diffuses lorsque les autres thérapies ont échoué (avis d’experts).


L'acupuncture figure ainsi parmi onze recommandations concernant les interventions non pharmacologiques (dont deux négatives, figure 1), et onze concernant les traitements pharmacologiques (dont une négative, figure 2).

Figure 1. Recommandations SFR/SOFMER 2024 pour la prise en charge non pharmacologique de la gonarthrose [1]. En coloré les interventions dont le niveau de preuve et la force de recommandation sont équivalents à ceux de l’acupuncture (niveau 1A, force B). Parmi les recommandations positives, l’acupuncture présente le score d’accord moyen le plus faible (7,97), proche de celui d’une recommandation négative (genouillères et kinesiotaping : 7,76).
Figure 2. Recommandations SFR/SOFMER 2020 concernant la prise en charge pharmacologique de la gonarthrose [2]. En coloré les interventions dont la force de recommandation (A) est supérieure celle de l'acupuncture (B), avec niveau de preuve équivalent (1A).

L’acupuncture est donc incluse comme option thérapeutique dans la gonarthrose avec un niveau de preuve 1A. En 2021, la Société française d’étude des migraines et céphalées avait émis une recommandation forte en faveur de l’acupuncture dans la prise en charge de la migraine [7]. Nous disposons ainsi de deux avis favorables récents portant sur des pathologies d’intérêt majeur en santé publique appuyés par le niveau de preuve le plus élevé.

Les recommandations françaises sur la gonarthrose s’inscrivent dans la continuité des recommandations européennes de l’OARSI (2019) [3] et américaines de l’ACR (2020) [4], dont elles reprennent la base bibliographique tout en l’actualisant.

Concernant l’acupuncture :

  • L’OARSI avait émis une recommandation négative (fait peu courant par rapport à une simple absence de recommandation) [3].
  • L’ACR avait formulé une recommandation positive conditionnelle [4, 8].

Les recommandations conjointes de la SFR et de la SOFMER marquent donc une évolution notable en renforçant les données de l'ACR par deux grands essais contrôlés randomisés multicentriques : Lv 2019 [5] et Tu 2021 [6].

Bien que fondée sur un niveau de preuve 1A et une force de recommandation B, la recommandation relative à l’acupuncture adopte une formulation inhabituelle, accompagnée d’un argumentaire qui émet plusieurs réserves, le comité soulignant notamment « plusieurs points à garder à l’esprit ».

- Une analgésie non spécifique ?

La recommandation propose l’acupuncture « à des fins analgésiques non spécifiques », une formulation très ambiguë, susceptible de plusieurs interprétations.

Elle pourrait d’abord laisser entendre que l’effet de l’acupuncture serait non spécifique, autrement dit principalement lié à des facteurs contextuels ou à un effet placebo. Pourtant les deux essais contrôlés de bonne qualité méthodologique cités dans l’argumentaire montrent bien une efficacité supérieure à celle de la fausse acupuncture [4, 5]. Cet effet spécifique est par ailleurs confirmé par des revues systématiques, notamment celles de Vickers 2018 [9] et Liu 2024 [10], incluant respectivement 9 et 15 ECR versus fausse acupuncture.

Elle semble aussi réduire l’acupuncture à une simple action sur la douleur. Mais les études mentionnées montrent également des effets significatifs sur la fonction (WOMAC) versus fausse acupuncture [5, 6, 10], ce qui dépasse une simple analgésie isolée.

L’idée d’un effet non spécifique pourrait enfin être comprise comme l’absence d’une action ciblée sur les mécanismes de la gonarthrose. Or cette interprétation est contredite par les données expérimentales. La revue systématique de Huang 2024 [11], portant sur 56 études expérimentales, met en évidence l’implication de voies immuno-inflammatoires spécifiques dans les effets de l’acupuncture sur des modèles animaux de gonarthrose. Par ailleurs la revue de Qu 2024 [12], fondée sur 15 études d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, rapporte une activation cohérente de certaines structures cérébrales associées à la modulation de la douleur et à la fonction motrice chez des patients atteints de gonarthrose. Ces résultats soutiennent la plausibilité biologique de l’acupuncture et l’existence de mécanismes d’action spécifiques, à la fois périphériques et centraux.

L’ambiguïté de la formulation de la recommandation est prolongée dans la phrase finale de l’argumentaire : « L’acupuncture semble être un choix pragmatique pour les personnes souffrant de douleurs chroniques diffuses ». On comprend mal sur quelles données cliniques repose une telle généralisation à des douleurs diffuses, alors que les données probantes disponibles portent spécifiquement sur la gonarthrose.

- Un effet limité au court terme ?

L’argumentaire affirme que l’effet de l’acupuncture serait limité à une durée inférieure à trois mois. Cela est pourtant contredit par l’essai contrôlé de Tu 2021 [6], cité dans le document, qui montre une efficacité sur la douleur et la fonction à six mois. Une revue systématique récente, Chen 2024 [13], incluant dix essais randomisés, confirme ces résultats : elle rapporte des bénéfices significatifs sur la douleur et la fonction entre 4,5 et 6 mois après le traitement, selon le comparateur retenu (fausse acupuncture, soins usuels ou diclofénac).

- Une prédominance des études chinoises ?

Les deux essais contrôlés randomisés cités dans l’argumentaire sont effectivement d’origine chinoise, mais cela ne permet pas d’affirmer une prédominance des études chinoises. La méta-analyse de Vickers 2018 [9], qui inclut neuf essais randomisés comparant acupuncture réelle et fausse acupuncture, rassemble exclusivement des études menées en Europe ou en Amérique du Nord, totalisant 2376 participants. Ces données, en faveur d’un effet spécifique de l’acupuncture dans la gonarthrose, soutiennent une généralisation des conclusions au-delà du contexte culturel chinois.

- Une hétérogénéité des techniques ?

L’argumentaire souligne l’hétérogénéité des techniques d’acupuncture comme une limite à la généralisation des résultats. Cette diversité est pourtant attendue dès lors que l’acupuncture est définie comme toute stimulation physique de points d’acupuncture, recouvrant ainsi différentes modalités de mise en œuvre. Une telle hétérogénéité est également observée pour de nombreuses autres interventions non médicamenteuses ou pour certaines classes pharmacologiques. Dans ce contexte, l’hétérogénéité des techniques ne saurait être confondue avec une hétérogénéité des effets.

- Un effet contextuel et des biais méthodologiques ?

L’argumentaire évoque un effet placebo contextuel. Pourtant, cette hypothèse est contredite à la fois par les deux études citées [5, 6] et par de solides données cliniques [9, 10] et expérimentales [11, 12] .

Le « biais possible » mentionné concerne le respect strict des procédures de contrôle. Or, les essais sur l’acupuncture recourent à des méthodes de contrôle les plus rigoureuses et sophistiquées parmi les interventions non médicamenteuses. En l’absence de démonstration d’un biais spécifique dans les études retenues, cette critique générale apparaît infondée.

- Un coût potentiel pour le patient ?
L’argumentaire évoque un coût potentiel pour l’individu. Cette remarque ne tient toutefois pas compte du fait qu’en France l’acupuncture est remboursée par l’assurance maladie.

Au-delà du seul point de vue individuel, trois études médico-économiques, dont celle menée par le NICE au Royaume-Uni, indiquent un rapport coût-efficacité favorable à l’acupuncture dans la gonarthrose [1417]. Dans l’analyse restreinte aux essais à faible risque de biais, l’acupuncture est l’intervention non pharmacologique présentant le meilleur rapport coût-efficacité pour le traitement de l’arthrose du genou (Woods 2017 [17]).

La recommandation de l'acupuncture repose sur un niveau de preuve 1A et il est notable que le comité de pilotage ait jugé nécessaire d'émettre des réserves, tant dans la formulation que l'argumentaire, au point d'en faire une option de dernier recours "lorsque les autres thérapies ont échoué".

Observons également que l’acupuncture est la seule recommandation, avec les cures thermales (niveau de preuve 1B, force C), pour laquelle il est utilisé dans la formulation le conditionnel (pourrait être), qui exprime une réserve implicite, alors que toutes les autres recommandations relèvent soit de l’impératif (doit), soit de l’indicatif (peut). L'impératif est ainsi utilisé pour les chaussures (niveau de preuve 4, force C).

Cette dissonance concernant l'acupuncture entre les données factuelles et l’avis des experts pose question. Elle se traduit également par le score d’agrément le plus faible parmi toutes les recommandations positives aussi bien dans le comité de pilotage (7,9/10) que dans le comité de lecture (6,9/10) (figure 1).

- Des critiques génériques convenues, indépendantes des données spécifiques

Les réserves formulées mobilisent, en fait, des arguments généraux, sans lien direct avec les résultats rapportés pour la gonarthrose, et même contredits par eux. Elles reprennent des critiques convenues, répétées systématiquement dans les débats sur l’acupuncture, mais depuis longtemps déconnectées de l’évolution réelle des données probantes.

Cela dit, les questions posées à l’acupuncture ne sont pas illégitimes. Mais encore faut-il que les réponses soient fondées sur les données effectivement disponibles, et que le même questionnement soit appliqué à l’ensemble des thérapeutiques évaluées.

- Une asymétrie d'exigences

Avec un niveau de preuve 1A et une force de recommandation B, l’acupuncture est classée en dessous de la force A attribuée aux injections intra-articulaires de corticoïdes ou d’acide hyaluronique, ou encore aux antiarthrosiques symptomatiques d’action lente (AASAL) parmi les traitements médicamenteux (figure 2). En ce qui concerne les traitements non médicamenteux elle est positionnée au même niveau que les orthèses unicompartimentales de décharge ou les programmes d’exercices physiques (figure 1).

  • Les injections intra-articulaires de corticoïdes. Leur efficacité est limitée au court terme, sans bénéfice démontré au-delà de trois mois (Jüni 2015 [18], Orchard 2020 [19]). Un essai contrôlé randomisé rigoureux, comparant les corticostéroïdes à des injections de sérum salé, n’a montré aucun effet clinique significatif à tous les temps de l’évaluation jusqu’à deux ans, mais a mis en évidence une perte accrue de cartilage en cas d’injections répétées (McAlindon 2017 [20]).
  • Les injections intra-articulaires d’acide hyaluronique. La revue systématique de Pereira 2022 [21] montre un effet modeste de la viscosupplémentation par rapport au placebo, sans bénéfice démontré au-delà du court terme, et associé à une augmentation du risque d’événements indésirables graves. En France, dès 2017, du fait d'un service médical insuffisant (SMR), les dispositifs médicaux à base d’acide hyaluronique pour injection intra-articulaire ont été radiés de la liste des produits remboursables par l'Assurance Maladie.
  • les AASAL. Les antiarthrosiques symptomatiques d’action lente (AASAL) sont considérés comme ayant une efficacité modeste, reposant sur des données de faible qualité méthodologique. En France, ces médicaments ont été déremboursés en 2015 en raison d’un service médical rendu jugé insuffisant. La référence la plus récente citée dans les recommandations SFR/SOFMER, la revue systématique de Runhaar 2017 [22], conclut à une absence d’efficacité de la glucosamine par rapport au placebo. De plus, il faut souligner l’hétérogénéité importante des substances regroupées sous le terme d’AASAL (glucosamine, sulfate de chondroïtine, insaponifiables d’avocat et de soja, diacéréine), tant par leur origine que par leurs mécanismes d’action présumés.
  • Les orthèses unicompartimentales de décharge. La revue Cochrane, Duivenvoorden 2015 [23], conclut à une absence de preuve concernant leur efficacité. Les deux essais cités dans les recommandations sont un essai en ouvert et un essai comparatif en complément de soins usuels, sans groupe placebo. Ces études, françaises, ne permettent donc pas d’éliminer un effet contextuel. Les deux études ont bénéficié d’un soutien industriel des laboratoires concernés et certains de leurs auteurs figurent dans le comité de pilotage des recommandations. La question du coût (plusieurs centaines d'euros) et du remboursement par l'Assurance Maladie des orthèses mentionnées ne sont pas discutés.
  • Les exercices physiques. La recommandation 5 stipule qu' " un programme d'exercices physiques, terrestres ou aquatiques, ciblant les membres inférieurs, doit être proposé ». La discussion n’aborde pas la question des effets contextuels, ni la grande diversité des types d’exercices, des modalités de mise en œuvre ou des contextes d’application.

Des facteurs limitants, en réalité non fondés, sont appliqués à l’acupuncture pour justifier, en dépit de son niveau de preuve, son déclassement en traitement de dernier recours. Ces mêmes éléments concernent pourtant d’autres thérapeutiques recommandées, sans entraîner de réserve équivalente. Il en est ainsi de l’absence d’effet spécifique démontré (exercices physiques, orthèses), de la limitation des effets au court terme (toutes les thérapeutiques), de l’hétérogénéité des pratiques ou des substances (programmes d’exercices, AASAL), ou encore du coût pour le patient (orthèses, viscosupplémentation, AASAL).
Il faut ajouter à cela l’absence d’analyse explicite de la balance bénéfices/risques pourtant déterminante pour définir la place d’une thérapeutique. Le profil de sécurité de l’acupuncture est bien établi et plus favorable que celui, par exemple, des injections de corticostéroïdes (dégradation du cartilage), de la viscosupplémentation (augmentation des événements indésirables graves), du paracétamol (toxicité hépatique) ou des AINS (risques digestifs, cardiovasculaires et rénaux).

La discordance entre les données probantes et les réserves exprimées ne traduit pas une hésitation scientifique interne, mais une tension persistante, nourrie par la controverse, autour de la nature et de la place de l’acupuncture dans le cadre médical.

Nécessaire clarification du statut de l’acupuncture

Cette tension tient d’abord au classement de l’acupuncture parmi les médecines complémentaires ou intégratives. Ce positionnement véhicule un présupposé de non-scientificité, lié à une distance perçue vis-à-vis de la médecine conventionnelle et à un manque supposé de preuves. Il entretient ainsi un doute présenté comme légitime, qui conduit à relativiser les données disponibles en leur opposant des réserves systématiques.

Cette logique de disqualification se manifeste dans la manière dont l’acupuncture est présentée dans l’argumentaire, décrite comme une pratique reposant « sur le concept de Qi, cette énergie vitale qui circule dans les méridiens ou voies du corps ». L’absence de recul critique ou de contextualisation face à cette définition installe un malentendu dès l’amont : en affirmant que la pratique serait indissociable de ces concepts, la validité de l’acupuncture se trouve dès lors subordonnée à la reconnaissance préalable de ce cadre explicatif. C’est là un contresens épistémologique qui structure l’ensemble des débats sur l’acupuncture : la réalité d’un phénomène (ici, l’effet thérapeutique) ne dépend pas de l’interprétation que l’on en donne. Il revient à la recherche médicale d’évaluer les effets, indépendamment du système conceptuel dans lequel ils ont été historiquement formulés. En posant ces concepts comme définitoires de la pratique, l’écart avec la médecine conventionnelle est verrouillé, biaisant toute discussion.

Pour sortir de cette impasse, il appartient aux médecins acupuncteurs de définir clairement l’acupuncture dans le cadre médical. Il s'agit de récuser les interprétations idéologiques et culturalistes qui créent une opposition artificielle avec la médecine conventionnelle, entrainant ainsi une classification de l’acupuncture dans les médecines complémentaires et intégratives.

Points clés

  • 🟢 L’acupuncture figure comme option thérapeutique dans la prise en charge de la gonarthrose dans les recommandations conjointes de la SFR et de la SOFMER, avec un niveau de preuve 1A, le plus élevé.
  • 🟡 Mais de nombreuses réserves sont émises dans la formulation ou l'argumentaire. Ces réserves sont pourtant contredites par les données probantes disponibles.
  • 🟡 Il existe une asymétrie entre l’attribution inappropriée à l’acupuncture de facteurs limitants et l’absence de réserves pour d’autres thérapeutiques, alors que ces facteurs sont bien présents.
  • 🟡 Les rapports bénéfice-risque et coût-efficacité, favorables à l’acupuncture ne sont pas pris en compte dans l'analyse des thérapeutiques.
  • 🟡 Il existe une dissonance entre le niveau de preuve et l'avis des experts, traduisant une tension sur ce que serait la nature de l'acupuncture.
  • 🟢Il est nécessaire de redéfinir l’acupuncture dans le cadre médical, en récusant les interprétations culturalistes et sa classification dans les médecines complémentaires et intégratives.

Dr Johan Nguyen & Dr Olivier Goret

Références

  1. Pers YM, Nguyen C, Borie C, Daste C, Kirren Q, Lopez C, Ouvrard G, Ruscher R, Argenson JN, Bardoux S, Baumann L, Berenbaum F, Binard A, Coudeyre E, Czernichow S, Dupeyron A, Fabre MC, Foulquier N, Gérard C, Hausberg V, Henrotin Y, Jeandel C, Lesage FX, Liesse B, Mainard D, Michel F, Ninot G, Ornetti P, Oude-Engberink A, Rat AC, Richette P, Roren A, Thoumie P, Walrand S, Rannou F, Sellam J; Société Française de Rhumatologie and Société Française de Médecine Physique et de Réadaptation. Recommendations from the French Societies of Rheumatology and Physical Medicine and Rehabilitation on the non-pharmacological management of knee osteoarthritis. Ann Phys Rehabil Med. 2024 Oct 26;67(7):101883. https://doi.org/10.1016/j.rehab.2024.101883🔓
  2. Sellam J, Courties A, Eymard F, Ferrero S, Latourte A, Ornetti P, Bannwarth B, Baumann L, Berenbaum F, Chevalier X, Ea HK, Fabre MC, Forestier R, Grange L, Lellouche H, Maillet J, Mainard D, Perrot S, Rannou F, Rat AC, Roux CH, Senbel E, Richette P. Recommandations de la Société française de rhumatologie sur la prise en charge pharmacologique de la gonarthrose. Revue du Rhumatisme. 2020;87(6):439-446. https://doi.org/10.1016/j.rhum.2020.07.013
  3. Bannuru RR, Osani MC, Vaysbrot EE, Arden NK, Bennell K, Bierma-Zeinstra SMA, Kraus VB, Lohmander LS, Abbott JH, Bhandari M, Blanco FJ, Espinosa R, Haugen IK, Lin J, Mandl LA, Moilanen E, Nakamura N, Snyder-Mackler L, Trojian T, Underwood M, McAlindon TE. OARSI guidelines for the non-surgical management of knee, hip, and polyarticular osteoarthritis. Osteoarthritis Cartilage. 2019 Nov;27(11):1578-1589. https://doi.org/10.1016/j.joca.2019.06.011🔓
  4. Kolasinski SL, Neogi T, Hochberg MC, Oatis C, Guyatt G, Block J, Callahan L, Copenhaver C, Dodge C, Felson D, Gellar K, Harvey WF, Hawker G, Herzig E, Kwoh CK, Nelson AE, Samuels J, Scanzello C, White D, Wise B, Altman RD, DiRenzo D, Fontanarosa J, Giradi G, Ishimori M, Misra D, Shah AA, Shmagel AK, Thoma LM, Turgunbaev M, Turner AS, Reston J. 2019 American College of Rheumatology/Arthritis Foundation Guideline for the Management of Osteoarthritis of the Hand, Hip, and Knee. Arthritis Rheumatol. 2020 Feb;72(2):220-233. https://doi.org/10.1002/art.41142 🔓
  5. Lv ZT, Shen LL, Zhu B, Zhang ZQ, Ma CY, Huang GF, Yin J, Yu LL, Yu SY, Ding MQ, Li J, Yuan XC, He W, Jing XH, Li M. Effects of intensity of electroacupuncture on chronic pain in patients with knee osteoarthritis: a randomized controlled trial. Arthritis Res Ther. 2019 May 14;21(1):120. https://doi.org/10.1007/s40122-025-00713-x 🔓
  6. Tu JF, Yang JW, Shi GX, Yu ZS, Li JL, Lin LL, Du YZ, Yu XG, Hu H, Liu ZS, Jia CS, Wang LQ, Zhao JJ, Wang J, Wang T, Wang Y, Wang TQ, Zhang N, Zou X, Wang Y, Shao JK, Liu CZ. Efficacy of Intensive Acupuncture Versus Sham Acupuncture in Knee Osteoarthritis: A Randomized Controlled Trial. Arthritis Rheumatol. 2021 Mar;73(3):448-458. https://doi.org/10.1002/art.41584
  7. Demarquay G, Moisset X, Lantéri-Minet M, de Gaalon S, Donnet A, Giraud P, Guégan-Massardier E, Lucas C, Mawet J, Roos C, Valade D, Ducros A. Revised guidelines of the French Headache Society for the diagnosis and management of migraine in adults. Part 1: Diagnosis and assessment. Rev Neurol (Paris). 2021 Sep;177(7):725-733. https://doi.org/10.1016/j.neurol.2021.07.009
  8. Nguyen J. L’acupuncture dans l’arthrose périphérique : des recommandations positives de l’American College of Rheumatology qui posent question. Acupuncture Preuves & Pratiques. Juin 2020. |URL|🔓
  9. Vickers AJ, Vertosick EA, Lewith G, MacPherson H, Foster NE, Sherman KJ, Irnich D, Witt CM, Linde K; Acupuncture Trialists’ Collaboration. Acupuncture for Chronic Pain: Update of an Individual Patient Data Meta-Analysis. J Pain. 2018 May;19(5):455-474. https://doi.org/10.1016/j.jpain.2017.11.005 🔓
  10. Liu CY, Duan YS, Zhou H, Wang Y, Tu JF, Bao XY, Yang JW, Lee MS, Wang LQ. Clinical effect and contributing factors of acupuncture for knee osteoarthritis: a systematic review and pairwise and exploratory network meta-analysis. BMJ Evid Based Med. 2024 Nov 22;29(6):374-384. https://doi.org/10.1136/bmjebm-2023-112626 🔓
  11. Huang Y, Huang H, Chen Q, Luo Y, Feng J, Deng Y, Li G, Li M, Sun J. Efficacy and immune-inflammatory mechanism of acupuncture-related therapy in animal models of knee osteoarthritis: a preclinical systematic review and network meta-analysis. J Orthop Surg Res. 2024 Mar 8;19(1):177. https://doi.org/10.1186/s13018-024-04660-9 🔓
  12. Qu Y, Peng Y, Xiong Y, Dong X, Ma P, Cheng S. Acupuncture-Related Therapy for Knee Osteoarthritis: A Narrative Review of Neuroimaging Studies. J Pain Res. 2024 Feb 27;17:773-784. https://doi.org/10.2147/jpr.s450515 🔓
  13. Chen H, Shi H, Gao S, Fang J, Yi J, Wu W, Liu X, Liu Z. Durable Effects of Acupuncture for Knee Osteoarthritis: A Systematic Review and Meta-analysis. Curr Pain Headache Rep. 2024 Jul;28(7):709-722. https://doi.org/10.1007/s11916-024-01242-6 🔓
  14. Hyun E, Shin BC, Kim N, Lim B. Economic evaluation of acupuncture as an adjunctive treatment with usual care for mild-to-moderate knee osteoarthritis: A Markov model-based analysis. Integr Med Res. 2023 Sep;12(3):100982. https://doi.org/10.1016/j.imr.2023.100982🔓
  15. Nguyen J. Évaluation coût-efficacité du traitement par acupuncture de la gonarthrose. Acupuncture Preuves & Pratiques. Octobre 2023. https://gera.fr/evaluation-cout-efficacite-du-traitement-par-acupuncture-de-la-gonarthrose/ 🔓
  16. Evidence review for the clinical and cost-effectiveness of acupuncture for people with osteoarthritis: Osteoarthritis in over 16s: diagnosis and management: Evidence review F. London: National Institute for Health and Care Excellence (NICE); 2022 Oct. (NICE Guideline, No. 226.) https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK590294/ 🔓
  17. Woods B, Manca A, Weatherly H, Saramago P, Sideris E, Giannopoulou C, et al. Cost-effectiveness of adjunct non-pharmacological interventions for osteoarthritis of the knee. PLoS One. 2017;12(3):e0172749. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0172749 🔓
  18. Jüni P, Hari R, Rutjes AW, Fischer R, Silletta MG, Reichenbach S, da Costa BR. Intra-articular corticosteroid for knee osteoarthritis. Cochrane Database Syst Rev. 2015 Oct 22;2015(10):CD005328. https://doi.org/10.1002/14651858.cd005328.pub3🔓
  19. Orchard JW. Is there a place for intra-articular corticosteroid injections in the treatment of knee osteoarthritis? BMJ. 2020;368:l6923. https://doi.org/10.1136/bmj.l6923
  20. McAlindon TE, LaValley MP, Harvey WF, Price LL, Driban JB, Zhang M, et al. McAlindon TE, LaValley MP, Harvey WF, Price LL, Driban JB, Zhang M, et al. Effect of intra-articular triamcinolone vs saline on knee cartilage volume and pain in patients with knee osteoarthritis: a randomized clinical trial. JAMA. 2017;317(19):1967–1975. https://doi.org/10.1001/jama.2017.5283🔓
  21. Pereira TV, Jüni P, Saadat P, Xing D, Yao L, Bobos P, Agarwal A, Hincapié CA, da Costa BR. Viscosupplementation for knee osteoarthritis: systematic review and meta-analysis. BMJ. 2022 Jul 6;378:e069722. https://doi.org/10.1136/bmj-2022-069722🔓
  22. Runhaar J, Rozendaal RM, van Middelkoop M, Bijlsma HJW, Doherty M, Dziedzic KS, Lohmander LS, McAlindon T, Zhang W, Bierma Zeinstra S. Subgroup analyses of the effectiveness of oral glucosamine for knee and hip osteoarthritis: a systematic review and individual patient data meta-analysis from the OA trial bank. Ann Rheum Dis. 2017 Nov;76(11):1862-1869. https://doi.org/10.1136/annrheumdis-2017-211149 🔓
  23. Duivenvoorden T, Brouwer RW, van Raaij TM, Verhagen AP, Verhaar JAN, Bierma-Zeinstra SMA. Braces and orthoses for treating osteoarthritis of the knee. Cochrane Database Syst Rev. 2015;(3):CD004020. https://doi.org/10.1002/14651858.cd004020.pub3 🔓

Vues : 20

Mots-clés : Recommandation de bonne pratique - Rhumatologie


Imprimer

Une remarque, une question ? Laissez un commentaire.




    Thematiques

    Votre recherche

    Abonnement à notre infolettre
    Abonnez-vous pour être informé des derniers articles et formations mis en ligne
    Thanks for signing up. You must confirm your email address before we can send you. Please check your email and follow the instructions.
    Nous respectons votre vie privée. Vos informations sont en sécurité et ne seront jamais partagées.
    Don't miss out. Subscribe today.
    ×
    ×
    WordPress Popup Plugin