Icon/Horloge Created with Sketch. 12.06.2020

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17- Nausées et vomissements chimio-induits : à quel moment effectuer l’acupuncture ?

Depuis la publication emblématique de la Cochrane Collaboration (Jeanette Ezzo 2006 [1]), l’intérêt de l’acupuncture dans les nausées et vomissements chimio-induits s’est trouvé confirmé par un ensemble d’autres revues systématiques [2]. Sur les 20 recommandations de bonne pratique de sociétés savantes publiées ces dix dernières années, 18 énoncent des recommandations positives pour l’acupuncture [2].

Un aspect essentiel de la recherche clinique en acupuncture est la détermination du protocole optimal : identifier les points, les techniques de stimulation et les modalités temporelles les plus efficaces dans une pathologie donnée. Un essai contrôlé randomisé cherche ainsi à déterminer le meilleur moment d’application de l’acupuncture : juste avant ou juste après la séance de chimiothérapie [3].

150 patients devant subir une chimiothérapie pour cancer du poumon sont randomisés en trois groupes :

  • un groupe de contrôle qui reçoit 30 minutes avant la chimiothérapie une injection de tropisétron (antagoniste sélectif des récepteurs 5-HT3 à la sérotonine).
  • un groupe expérimental 1 qui reçoit 30 minutes avant la chimiothérapie une injection de tropisétron et une séance d’acupuncture.
  • un groupe expérimental 2 qui reçoit 30 minutes avant la chimiothérapie une injection de tropisétron, et 30 minutes après la chimiothérapie une séance d’acupuncture.

Les traitements sont réalisés une fois par jour pendant les trois jours de la chimiothérapie (J1-J3). Le critère principal est l’évaluation en cinq grades (0 à V) des nausées et vomissements à partir de la Classification OMS des toxicités de la chimiothérapie. Les critères secondaires sont le retentissement général évalué sur l’index d’activité (Karnofsky performance status scale, KPS)  et la neutropénie.

À J1 aucune différence n’est observée entre les trois groupes. À J2 l’intensité des nausées et vomissements dans le groupe 1 était significativement améliorée par rapport au groupe contrôle, mais sans différence avec le groupe 2. A J3, l’intensité dans les deux groupes expérimentaux était significativement améliorée par rapport au groupe de contrôle, et le traitement pré-chimiothérapie significativement plus efficace que le traitement post-chimiothérapie. À J3 le KPS est moins aggravé dans le groupe 1 que dans les deux autres groupes. Aucune différence n’est observée quant à la neutropénie.

L’étude suggère donc que l’association acupuncture + tropisétron est supérieure au tropisétron seul dans les nausées et vomissements précoces et qu’une application juste avant la chimiothérapie est plus efficace que juste après.

Le traitement par acupuncture comporte les points 36E, 6MC et 12VC (tableau 1). Dans une revue de 119 études cliniques ces trois points sont les plus fréquemment utilisés, constituant ainsi la base d’un consensus [4].

Tableau 1. Protocole d’acupuncture [3].

Notons que l’effet de l’acupuncture (12VC et 6MC) sur les nausées chimio-induites est également mis en évidence chez le rat (figure 1 [5]).  L’action de l’acupuncture parait passer par une inhibition de la réponse émétique au niveau du noyau du tractus solitaire induite par la cisplatine [5].


Figure 1. Les rats ne possédant pas de réflexe émétique, le comportement de pica, l’ingestion de substances non alimentaires (comme le kaolin), est validé comme indice de nausées et de vomissements.  La consommation de kaolin chez des rats, ayant également à disposition de la nourriture, est donc utilisée pour tester les traitements antiémétiques. Dans l’expérience les rats sont randomisés en 4 groupes : (1) Contrôle avec fausse acupuncture (faux points), (2) Cisplatine avec fausse acupuncture, (3) Cisplatine avec acupuncture au 12VC, (4) Cisplatine avec acupuncture au 6MC. L’acupuncture au 12VC (J1 et J2) et au 6MC (J1) diminue la consommation de kaolin induite par l‘injection de cisplatine (Cui 2016 [5])


Dr Johan Nguyen

Références


  1. Ezzo JM, Richardson MA, Vickers A, Allen C, Dibble SL, Issell BF, Lao L, Pearl M, Ramirez G, Roscoe J, Shen J, Shivnan JC, Streitberger K, Treish I, Zhang G. Acupuncture-point stimulation for chemotherapy-induced nausea or vomiting. Cochrane Database Syst Rev. 2006;(2):CD002285. [141212].  |doi|.
  2. Nguyen J, Pernice C. Nausées-vomissements post-chimiothérapie : évaluation de l'acupuncture. Centre de Preuves en Acupuncture. Juillet 2019.  |URL|.
  3. Wang YL , Li JX , Guo XQ , Fu RY , Guan XJ. [Effect of acupuncture in different time on nausea and vomiting induced by chemotherapy of lung cancer]. Chinese Acupuncture and Moxibustion. 2019;39(12):1269-73.   [204512].  |doi|.
  4. An Qi, Chen Bo, Guo Yi, An Xing-Fang, Guo Yong-Ming. Preliminary discussion on rules of clinical acupoint selection of acupuncture for the treatment of chemotherapy-induced nausea and vomiting. World Journal of Acupuncture-Moxibustion. 2015;25(2):39.   [189326].  |doi|.
  5. Cui Y, Wang L, Shi G Liu L, Pei P, Guo J. Electroacupuncture alleviates cisplatin-induced nausea in rats. Acupuncture in Medicine. 2016;34(2):120-6.   [190278]. |doi|.
Vues : 488

Mots-clés : Oncologie


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  • Yves Maxime Dantec dit :

    rajouter l’auriculothérapie pour un meilleur résultat

    • Johan Nguyen dit :

      Pourquoi pas ?
      Mais il faut noter que la HAS a refusé de valider un protocole de coopération visant à autoriser les infirmiers à pratiquer dans le cadre des nausées et vomissements chimio-induits des actes d’acupuncture. Le traitement proposé consistait en une association simple d’ acupuncture (6MC) et d’auriculothérapie (point zéro) et le motif principal du refus était que l’auriculothérapie n’est pas une technique validée. L’HAS propose que soit représenté un protocole spécifiquement d’acupuncture. Cela suggère en creux que l’HAS considère que l’acupuncture est une technique validée, ce qui apparait pour le moins très rarement dans ses avis. Cela montre aussi que l’intérêt professionnel collectif n’est pas de distinguer entre « acupuncture » et « auriculothérapie » mais de considérer de bon sens « acupuncture » comme un terme générique incluant l’auriculothérapie. Enfin cela met en évidence que le discours « neurophysiologique » des auriculothérapeutes accompagné d’une mise à distance critique des concepts de l’acupuncture ne se traduit pas par un niveau d’évaluation supérieur à celui de l’acupuncture, bien au contraire.

      1- Avis n° 2020.0016/AC/SA3P du 12 février 2020 du collège de la Haute Autorité de santé relatif au protocole de coopération « Actes d’acupuncture et/ou d’auriculothérapie réalisés par un infirmier en lieu et place d’un médecin » |URL|

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